Les 5 Corevih d’Ile-de-France organisent une soirée/débat Post-CROI 2018 le Jeudi 3 mai 2018, destinée aux personnes vivant avec ou affectées par les virus du VIH/VHB/VHC, aux acteurs associatifs et au grand public.

A l’occasion de la CROI 2018 ( Conférence internationale sur les Rétrovirus et les Infections Opportunistes), les médecins des Corevih franciliens présenteront une sélection de sujets scientifiques et médicaux qui ont marqué la conférence. Lire la suite

La surveillance nationale des contaminations professionnelles par le VIH, le VHC et le VHB chez le personnel soignant. Cette surveillance a été transférée depuis le 1er mai 2017 au GERES qui en assure la mise en oeuvre et l’analyse des données, en collaboration avec Santé Publique France, dans le strict respect de la confidentialité.

Le dernier recensement a été fait en 2012 par Santé Publique France. Si vous avez connaissance d’une contamination professionnelle par le VIH, le VHC ou le VHB après un AES, merci de la déclarer en utilisant les formulaires disponibles sur le site du GERES

Les formulaires sont à adresser sous pli confidentiel au :
GERES – Dr Dominique ABITEBOUL
UFR de Médecine Bichat, 16 rue Henri Huchard, 75018 PARIS

Votre déclaration permettra de réaliser la mise à  jour du bilan sur le nombre total de cas survenus en France en collaboration avec Santé Publique France et d’aider à la prévention et à la prise en charge des expositions accidentelles.

L’équipe dirigée par Isabelle Maridonneau-Parini, chercheuse Inserm à Toulouse, a pour la première fois montré que le VIH-1 infecte les ostéoclastes, cellules responsables de la dégradation du tissu osseux, nécessaire pour son remodelage, cellules naturellement chargées de dégrader l’os. Ce faisant, le virus décuple l’efficacité de ces cellules, créant un déficit osseux progressif avec un risque accru d’ostéoporose et de fractures.

L’infection par le VIH accélère la dégradation des os. Le risque de déficit osseux est même six fois plus élevé chez les personnes infectées par ce virus que chez les sujets sains, entrainant des risques accrus d’ostéopénie, d’ostéoporose et de fractures. Cet effet est connu depuis plusieurs années et s’explique à la fois par l’effet des traitements antirétroviraux, néfastes pour les os, mais aussi par l’infection elle-même. Des travaux avaient déjà montré un rôle indirect du système immunitaire. Mais pour la première fois, l’équipe dirigée par Isabelle Maridonneau-Parini* va beaucoup plus loin et prouve que le virus agit directement sur le métabolisme osseux en infectant les cellules naturellement chargées de dégrader l’os : les ostéoclastes. L’équipe a aussi identifié la protéine virale impliquée dans ce processus.

Les ostéoclastes, cibles du VIH-1

Pour arriver à ces conclusions, les chercheurs ont montré – in vivo dans un modèle murin humanisé et ex vivo dans des explants de tissu articulaire humain – que le VIH-1 cible les ostéoclastes. Ils ont constaté que les ostéoclastes et leurs précurseurs pouvaient être infectés à la fois par du VIH-1 libre et par contact avec des lymphocytes T infectés. « Les ostéoclastes proviennent de précurseurs présents dans le sang et la moelle osseuse qui sont également à l’origine des macrophages « Cellule du système immunitaire chargée d’absorber et de digérer les corps étrangers », des cibles du VIH importantes pour la pathogénèse. Les deux types de cellules portent à leur surface les mêmes récepteurs qui permettent l’entrée du virus« , explique Christel Verollet*, chercheuse Inserm co-responsable de ces travaux.

Les ostéoclastes peuvent ainsi être infectés à un stade très précoce dans le sang ou plus tard, au niveau de l’os, en présence de cellules immunitaires infectées, et cela sans effet cytotoxique qui a un effet toxique sur les cellules. « Il est pour l’instant difficile de savoir à quel moment l’infection se produit in vivo chez les patients. Chez les personnes dont la maladie est bien contrôlée par les traitements, l’infection pourrait se produire avant le début du traitement ou par contact avec des lymphocytes réservoirs abritant du virus dormant « , suggère Christel Verollet.

Une efficacité redoutable

Quoi qu’il en soit, l’activité d’un ostéoclaste est exacerbée après infection. La cellule devient hyper efficace dans son rôle de dégradation osseuse. « Chez des individus sains, il existe un équilibre  entre leur activité et celle des ostéoblastes  « Cellule permettant la formation de l’os », qui reforment l’os en permanence. Mais chez ces patients, les ostéoclastes infectés mettent les bouchées doubles, créant des déficits osseux« , explique la chercheuse. En pratique, l’équipe a constaté que l’infection entrainait une modification de la zone de scellement des ostéoclastes, qui délimite la région où s’effectue la dégradation du tissu osseux. Cette structure qui n’existe que dans ces cellules est essentiellement composée d’actine et permet l’adhérence à l’os et l’accumulation des enzymes nécessaires à sa dégradation. Or, en présence du virus, cette structure est plus dense, plus large, plus stable. « L’adhérence est meilleure et la zone de dégradation élargie« , clarifie-t-elle.

Photo : Ostéoclaste humain infecté par le VIH-1 (en rouge). La zone de scellement (en vert) impliquée dans la dégradation de la matrice osseuse est élargie. Les ostéoclastes sont des cellules géantes multinucléées (noyaux en bleu).

Une protéine virale identifiée

Les chercheurs ont été jusqu’à décrire les mécanismes moléculaires en cause. Ils ont observé que ces changements concordaient avec l’augmentation de l’activité de la protéine Src, largement impliquée dans l’organisation de cette zone de scellement. Or, une protéine virale appelée Nef est justement connue pour interagir avec Src. L’équipe a donc exploité un modèle murin transgénique exprimant Nef pour étudier son effet : les animaux présentent une augmentation de la surface couverte par les ostéoclastes et des os fragilisés, confirmant l’implication de cette protéine dans le phénomène.

La découverte de ces mécanismes ouvre la voie à de nouvelles approches thérapeutiques pour protéger la santé osseuse des patients séropositifs. Des traitements qui ciblent la zone de scellement sont en développement dans le domaine de l’ostéoporose et pourraient notamment apporter un bénéfice complémentaire aux malades.

Note
*chercheuse Inserm, UMR5089 CNRS/UT3 Paul Sabatier, équipe Phagocyte migration and differentiation, Institut de pharmacologie et de biologie structurale, Toulouse

Source
B Raynaud-Messina et coll. The bone degradation machinery of osteoclasts:a novel HIV-1 target that contributes to bone loss. Proc Natl Acad Sci USA, édition du 20 février 2018.

Source article : Inserm.fr

 

Vous trouverez en pièce jointe le second  livret « portraits d’acteurs » réalisé cette année sur le congrès AFRAVIH de Bordeaux en inter-COREVIH Bretagne/Ile de France Sud.

8 acteurs de la lutte contre les IST, VIH et hépatites ont été interviewés venant d’horizons très différents se regroupant autour du même combat.

A travers ce livret, nous souhaitions confronter les problématiques de nos COREVIH, tels que la PrEP, la santé mentale, les discriminations, populations clés, etc…; aux expériences des pays francophones qu’ils soient du Sud ou du Nord, afin de vous apporter des angles de vues différents.

Nos prochains portraits d’acteurs seront réalisés sur le congrès AIDS 2018 à Amsterdam et vous pourrez également prochainement découvrir celui réalisé sur AIDS 2016 à Durban.

 

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Portraits d'acteurs AFRAVIH 2018 2.08 MB - 18 avril 2018

8 acteurs de la lutte contre les IST, VIH et hépatites ont été interviewés venant...

 

 

Portraits d’acteurs sur la conférence AFRAVIH 2018 samedi 7 avril

Interview Léa Pelletier-Marcotte

Bonjour pouvez-vous présenter ainsi que votre parcours ?

Je suis Léa Pelletier-Marcotte, je suis avocate auprès de la coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le VIH sida la COCQ-SIDA. Nous sommes situés à Montréal et nous regroupons plusieurs organismes communautaires québécois dans la province qui sont tous plus ou moins directement engagés dans la lutte contre le VIH sida. Cela fait 4 mois que j’y travaille, avant j’étais avocate en litige civil et commercial avec un métier de formation. Le communautaire c’est un peu un retour dans mon passé du droit de la personne et droit international 

Justement est ce que vous pouvez nous parler un peu plus de COCQ-SIDA et de leurs missions ?

On développe des axes de plaidoyers communs sur lesquels doivent s’entendre tous les organismes membres. Je travaille pour 5 services juridiques secteur droit et donc je suis un peu l’avocate de référence pour chacun des organismes communautaires dont le quel je siège.

Je suis un peu le « contentieux de COCQ-SIDA », on dit ça de façon comique mais c’est la réalité, j’y travaille à temps plein et ma collègue qui travaille au service VIH info droits qui est à temps partiel trois jours par semaine qui elle, gère vraiment le service de première ligne c’est-à-dire service d’information juridique non seulement pour les personnes vivant avec le VIH mais aussi pour les intervenants d’organismes membres, acteurs de la santé et même le corps policier parfois qui ont des questions qui ont attrait au VIH et mon secteur c’est de voir un peu quelles sont les situations qui sont portées à notre attention à travers ce service de première ligne et de voir les axes de plaidoyers qu’on peut développer ou qu’on doit renforcer, notamment la discrimination en emploi, toutes autres discriminations, mais aussi des problèmes en matière d’immigration et de criminalisation du statut sérologique.

Quelles sont pour vous les 3 dates clés de la lutte contre le sida ?

Je sais qu’il y a des dates charnières mais pour moi la date clé c’est ma prise de conscience. J’étais au secondaire, donc je devais avoir 12 / 13 ans fin 90 début des années 2000, on avait eu un conférencier à l’école qui parlait un peu du VIH et du Sida et aussi un peu d’éducation sexuelle. Il faisait une intervention pour nous montrer comment bien mettre un condom sur une banane, tout le monde trouvait ça très drôle et pendant la conférence une personne nous dit qu’à la deuxième partie de la conférence on va rencontrer une personne vivant avec le VIH.

Tout le monde s’est dit de quoi ça à l’air une personne qui vit avec le VIH parce que des jeunes de la banlieue aisée de Montréal qui n’ont plus ou moins jamais été confronté à ces situations à part la marchandisation autour du VIH. Il s’est avéré que la personne vivant avec le VIH c’était lui, il nous a raconté son histoire. C’est vraiment le moment où il y a eu un déclic, il y a eu quelque chose c’est toujours resté, je me suis toujours souvenu de ce moment-là, comme quoi on peut sensibiliser les gens d’une façon durable et efficace quand ils sont très jeunes. D’où l’importance que les personnes vivant avec le VIH soient aidées dans le développement de leur leadership car ce n’est pas facile, c’est un long parcours.

Dans quel contexte s’est créé la CCRCV ( Coalition Canadienne pour Réformer la Criminalisation du Vih) ?

C’était suite à une participation de plusieurs intervenants avocats, personnes vivant avec le VIH, dans une formation organisée aux Etats Unis qui s’appelle « HIV is not a crime » et donc plusieurs intervenants d’origine canadienne qui se sont retrouvés dans cette formation avec des intervenants des Etats Unis et qui ont eu l’idée suite à cette formation de se regrouper en coalition pour faire avancer un peu un changement d’approche au Canada en psychiatrie à la non divulgation des statuts sérologiques. On avait un problème criant, une augmentation des nombre de plaintes et nombre de condamnations, nombre de poursuites. Cet évènement a suscité un brainstorming chez plusieurs acteurs, il y a eu des rencontres puis la coalition est née.

L’augmentation de 11,6 % de nouveaux cas d’infections VIH au Canada en 2016 peut-il être en parti dû à cette criminalisation ? ou avez-vous pu identifier les causes de cette hausse ?

A notre avis la criminalisation peut être une source d’augmentation puisque la non connaissance de son statut peut être utilisé comme moyen de défense lors d’une poursuite en non divulgation. Cela peut réduire l’incitation au dépistage qui peut être fait et on sait que de nouvelles infections sont dues à des personnes aussi elles-mêmes récemment infectées ou qui ne connaissent pas leur séropositivité. On n’a pas de chiffres donc pas nécessairement  de preuves concrètes mais quand on parle avec des intervenants de la santé publique il y a un lien, une corrélation, qui peut être faite. La criminalisation et l’utilisation de non connaissance de son statut comme moyen de défense peut être un aspect à prendre en compte dans l’augmentation.

Quels sont les premiers impacts positifs des actions de la CCRCV et que reste-t-il encore à faire ?

Il reste beaucoup à faire ! Une première victoire : dès sa formation la coalition a œuvré en prenant en compte les volontés de chacun sur la réforme de l’approche canadienne en matière de criminalisation de la non divulgation. On a fait un grand recensement une grande consultation canadienne en prenant en compte les souhaits des intervenants, des personnes vivant avec le VIH  hospitalisées ou non, qui a mené à la publication d’une déclaration, d’un consensus dans lequel on exigeait plusieurs choses dans la réforme de l’approche en criminalisation.

Cette déclaration de consensus a été publiée officiellement fin novembre 2017 et après avoir bien auparavant dit qu’il y avait une volonté de revoir la criminalisation du VIH par le ministère de la justice fédérale, le 1er décembre 2017 il y a eu la sortie d’un rapport fédéral qui parle un peu de la nécessité de revoir l’approche canadienne sur la criminalisation du VIH et c’est un rapport important, majeur, qui dans sa rédaction a participé la coalition forte de son expertise, forte de sa crédibilité en impliquant les gens affectés qui ont très vite été consultés et donc sa participation a mené à l’aboutissement de ce rapport. Donc non seulement il y a eu la déclaration qui coïncidait avec l’issue du rapport mais il y a eu la participation de la coalition dans les étapes qui ont menés à la publication de ce rapport par le gouvernement fédéral canadien.

Donc il semble une volonté claire de l’agence de santé publique du canada et du ministère général de la justice qui confirme qu’il y a un problème et qu’il faut le changer donc c’est une victoire en soi. Cependant comment ça fonctionne au Canada c’est un peu plus complexe parce que c’est le fédéral qui gère le contenu du droit criminel mais c’est les provinces qui gère son application et sa portée. Le travail qui reste à faire c’est au niveau provincial pour s’assurer que la volonté du fédéral soit transcrite, soit traduite à travers des directives aux procureurs qui lorsqu’ils font face à une plainte en non divulgation sachent que la criminalisation ou déposer des accusations en agressions sexuelles graves n’est pas approprié.

Donc il reste beaucoup de travail à faire au niveau provincial, la majorité des provinces n’ont rien fait suite au dépôt du rapport fédéral qui lui travaille à l’écriture de directives semblerait-il au niveau des territoires parce que ce sont eux qui sont responsables de ces juridictions mais au niveau des provinces il reste du travail à faire. Et au niveau fédéral ce qu’il reste à faire c’est ce à quoi la coalition a participé, c’est réformer le code criminel, ou peut-être prévoir des dispositions spécifiques à la non divulgation, mais reste à voir la forme et l’étendu de ces recommandations.

 

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Interview Léa Pelletier-Marcotte 607.84 KB - 7 avril 2018

Interview Léa Pelletier-Marcotte - AFRAVIH 2018 ...

 

Interview Alia Amimi

 

ITPC-MENA est la branche de la Coalition internationale de Préparation aux Traitements (ITPC), un groupe d’activistes et d’organisations qui plaident pour l’accès au traitement du VIH dans la région Afrique du Nord et Moyen Orient.

Pouvez-vous vous présenter et nous parler de votre parcours ?

Je m’appelle Alia AMIMI. Je suis chargée de plaidoyer à ITPC-MENA. C’est la coalition internationale pour la préparation aux traitements, ça fait à peine un an que j’ai rejoint l’équipe, J’ai eu un parcours assez court pour rester honnête, j’ai travaillé un peu à la banque africaine de développement et avant j’ai eu quelques expériences au PNUD (Programme des Nations Unies pour le Développement) et j’ai fait un master en gouvernance et intelligence internationale à sciences po.

Est-ce que vous pouvez présenter ITPC MENA ?

C’est une ONG qui fait partie de la famille ITPC globale, il y’a plusieurs régions (Afrique du nord et Moyen-Orient ça va de la Mauritanie au Pakistan) et on travaille principalement sur les questions en rapport aux règles de propriété intellectuelle qui peuvent entraver l’accès aux traitements dans la région maintenant on héberge aussi la plateforme du front mondial pour la communication et la coordination. Nos missions englobent principalement les objectifs tels que l’accès universel aux traitements, l’accès aux ARV, l’amélioration des conditions de vie des personnes séropositives, la transparence dans les processus de financement.

Quelles sont pour vous les 3 dates clés de la lutte contre le Sida ?

L’année 1996 c’est l’arrivée des ARV pour traiter les personnes séropositives. 2003 le début du fond mondial au Maroc pour pouvoir financer des projets tels que ceux des associations de lutte contre le sida, création du CCM. 2015 c’est la création d’ITPC MENA pour favoriser l’accès aux traitements dans la région puisque c’est une des régions qui a moins accès aux traitements dans le monde entier, c’est une région où il le taux de prévalence et le moins élevé au monde mais qui connait le nombre de décès le plus élevé.

Pensez-vous qu’en Afrique du Nord il y a une plus grande place qui est donnée aux activistes pour la prise en charge des personnes vivant avec le VIH et est ce qu’il est bénéfique ?

Les activistes ont de plus en plus de place et un rôle incontournable dans la prise en charge des patients parce que c’est grâce à des ONG et à la société civile qu’on a pu mettre en avant les enjeux et les défis qui sont liés à l’accès aux médicaments. Avant certaines personnes n’avaient aucune information au sujet de leur statut, au sujet du traitement qu’il devait prendre et tout ce qui est en rapport avec le virus du sida.

Maintenant des associations prennent en charge les personnes pour le dépistage, la prévention, pour sensibiliser l’opinion public à ce sujet. Je pense qu’ils ont un rôle de plus en plus important et que peut-être ils devraient être intégrés dans les discussions institutionnelles pour donner leur avis, leur point de vue parce que c’est eux qui sont en contact direct avec les gens, mais là peut être qu’en raison de la stigmatisation, de la marginalisation et la perception du sida ils ont encore des difficultés à atteindre les objectifs qu’ils se fixent.

Depuis 2015 nous accueillons la plateforme régionale de coordination et de communication du fond mondial et nous avons été reconduits l’année passée jusqu’en 2020. Les objectifs de cette plateforme sont d’améliorer la connaissance et la participation des acteurs de la société civile et des groupes communautaires sur les processus liés aux subventions du fond mondial,  améliorer l’impact des programmes du fond mondial et de la riposte aux 3 pandémies grâce aussi à un engagement renforcé de la société civile et des groupes communautaires touchés par le VIH, la tuberculose, le paludisme, élargir l’accès à l’assistance technique à la société civile et des groupes communautaires grâce à une meilleure coordination entre ITPC MENA l’initiative stratégique CRG du Fonds mondial et les autres partenaires, résistance technique type Expertise France et autres, soutenir les initiatives stratégiques de renforcement des capacités au profit de la société civile et des communautés en favorisant l’espace d’engagement et de participation collective au processus décisionnel clé et en particulier en ce qui concerne la communauté, le droit et le genre.

Depuis 2015 on essaye de coordonner tout ce qui est avec la société civile pour renforcer leur participation genre au CCM (Country Coordination Mecanismed) où il y a des représentants des populations clés et des personnes vivant avec les 3 pandémies VIH tuberculose et malarias, des HSH, des travailleurs du sexe et des usagers de drogues injectables. Notre rôle, c’est de s’assurer ces personnes-là ont les capacités et un rôle effectif pour participer et engager dans toutes les discussions et dans toutes les décisions du fond mondial dans les différents pays où il y a ces subventions-là.

Pouvez-vous revenir sur votre action à Abidjan concernant le prix d’un médicament ARV dont le brevet a été cédé à l’ensemble de l’Afrique sauf pour l’Algérie ?

En marge de l’organisation de la 19ème conférence ICASA en décembre 2017 à Abidjan, ITPC-MENA a organisé une action de solidarité pour l’inclusion du Dolutégravir qui est un médicament destiné aux premières lignes et troisièmes lignes, c’est un antirétroviral de dernière génération il a moins d’effets secondaires, il est moins toxique, les gens ne vont pas forcément développer de résistances quand ils le prennent. Le laboratoire ViiVHealthcare qui a produit ce médicament a permis au continent africain d’y avoir accès, d’avoir accès au brevet qui coute beaucoup moins cher sauf pour l’Algérie. Ils estiment que l’Algérie est un pays en transition, ce n’est pas un pays à revenus faible ou intermédiaire.

Les pays africains auront le générique à 41 dollars environ à peu près par patient et par an sauf les pays d’Afrique du Nord du Maghreb qui eux ont bénéficié d’un accord entre la fondation de Child et Bill Gates pour avoir le générique à 75 dollars et l’Algérie par contre doit payer 14 000 dollars par patient et par an. On a donc décidé de mener cette action pour mettre en lumière cette problématique et d’alerter le gouvernement algérien, la société civile algérienne, de l’injustice envers ce pays.

Nous avons aussi rencontré les représentants du laboratoire ViiVHealthcare lors d’un espace d’échange et de dialogue entre les représentants de la société civile et ceux de l’industrie pharmaceutique, on le fait chaque année et on a abordé cette question. On a demandé pourquoi l’Algérie est le seul pays qui est exclu, ils ont indiqué que ce n’est pas un marché stratégique pour eux mais c’est une référence pour les autres pays comme la Russie l’Argentine qui pourraient eux aussi être intégrés dans la licence volontaire qui permet d’avoir accès aux génériques.

Donc on a mobilisé toutes les associations et les organisations qui étaient présentes à ICASA pour mener une action de solidarité et pour essayer de sensibiliser les personnes sur ce sujet. Les brevets abusifs sont une des problématiques sur lesquels on travaille incessamment et on souhaite l’accès universel aux médicaments, on est contre les brevets abusifs.

Enfin ma dernière question, comment s’est organisé la manifestation générale à Marrakech en décembre 2017 ? quels ont été les obstacles et quelles réussites ?

C’était à l’occasion de la journée internationale de lutte contre le sida le 1er décembre. Nous avons décidé de signer la déclaration de Paris et de mobiliser la mairie de Marrakech pour que la ville s’engage à éradiquer le sida d’ici 2030. C’était en partenariat avec l’ALCS (Association de Lutte Contre le Sida), la mairie de Paris, la mairie de Séville qui est une ville jumelée avec Marrakech et ITPC-MENA. Les représentants ont signé la déclaration et Marrakech s’est engagé à éradiquer le sida. On a eu des actions parallèles à cette déclaration, on a préparé des sets de table pour sensibiliser les gens au dépistage, à la prévention du sida et on les a distribués sur la place Jemaa el-Fna. Pendant la période du 1er au 14 décembre on a aussi mené des actions telles que l’illumination de l’hôtel de ville de Marrakech avec le symbole du ruban rouge du sida pendant plus de 3 jours.

Les obstacles on a pas eu réellement d’obstacles les représentants de la mairie étaient vraiment motivés à participer, à s’engager, à mobiliser tous les volontaires de l’ALCS de la section de Marrakech pour aller parler aux gens, pour les sensibiliser.

Ce qu’il faut peut-être retenir aussi que ITPC-MENA existe depuis 2015 et qu’on entretient d’excellentes relations entre la mairie de Marrakech et avec toutes les instances officielles décisionnelles de la région de Marrakech et aussi au pays, c’est pour cela que ce n’a pas été tellement difficile finalement que Marrakech se mobilise. C’était la deuxième ville qui a signé l’engagement d’éradiquer le sida d’ici 2030 après Casablanca.

Concernant la population de Marrakech il n’y a pas eu de réticences, on a discuté avec beaucoup de monde, ils étaient vraiment contents de voir des actions qui avaient lieu pour sensibiliser la population et plutôt les adolescents.

 

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Interview Alia Amimi 838.17 KB - 7 avril 2018

Interview Alia Amimi  - AFRAVIH 2018 ...

Portraits d’acteurs sur la conférence AFRAVIH 2018 vendredi 6 avril

Interview Pauline Penot 

Pour les lecteurs qui ne vous connaîtraient pas, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Pauline PENOT. Je suis médecin interniste de formation et je travaille dans le service de médecine interne de maladies infectieuses de l’hôpital André Grégoire, qui est à Montreuil en Seine-Saint-Denis où j’ai déployé un CeGIDD ; à savoir un centre de santé sexuelle, dans lequel, on a agrémenté l’activité de PrEP mise en place depuis deux ans dans l’hôpital.

Pour vous, quelles sont les trois dates clés de la lutte contre le sida ?

Je crois que, dans le contexte territorial dans lequel nous on vit à Saint Denis, le progrès sur la prévention de la PrEP bénéficie à une population très ciblée population HSH et on rentre dans un rapport un peu différentiel par rapport aux HSH parisiens avec lesquels j’avais travaillé auparavant. Sur notre territoire ce sont des HSH qui sont moins identitaires, qui ont plus souvent jamais eu recours à la sérologie VIH, qui fréquentent moins de lieux de convivialité gay, parce qu’en Seine-Saint-Denis n’y en a peu ou pas. Ils ont une connaissance un peu différée dans le temps des stratégies de prévention de la PrEP, une moins bonne connaissance de façon générale sur la santé sexuelle, les IST bactériennes. La deuxième population qu’on voit beaucoup, en suivi de VIH, sont les personnes originaires d’Afrique Subsaharienne qui constituent l’essentielle de notre file active. Ces populations bénéficient peu ou pas du tout de la PrEP. Alors on essaye de leur faire bénéficier de tout ce qui est possible comme stratégie de prévention. Je pense que, sur ces populations-là, le Test and Treat ; à savoir le dépistage, beaucoup plus systématique, à l’occasion d’évènements symbolique de la vie comme notamment le dépistage prénatal des hommes aura un impact beaucoup plus fort de lutte contre l’épidémie que la tentative de l’élargissement de la PrEP qui seront toujours un peu à la marge.

Concernant l’élargissement à la PrEP à d’autre public, quels moyens de communication, avez- vous mis en particulier en place ? Et avez-vous travaillé sur des outils de communication pour les autres publics ?

On travaille surtout avec des acteurs de terrain qui sont beaucoup plus près des populations que nous. Ce sont des acteurs associatifs et qui ont plus l’accès direct aux outils de communications que nous. On a un peu travaillé sur des journaux ou des radios communautaires sur lequel on peut diffuser de la connaissance mais surtout après quand les personnes connaissent les dispositifs d’accès à la santé sexuelle que sont les CeGIDD. C’est répondre à leur demande première, raison pour laquelle elles viennent pour par la suite pouvoir créer du lien et parler PrEP de façon plus individuelle plus ajusté à leur besoin. Parler PrEP ou parler de façon générale de prévention du VIH, pour que des personnes est cette information pour elle-même et puisse éventuellement diffuser la connaissance autour d’elles. Sachant que diffuser la connaissance, c’est quelque chose qui marche assez bien dans le milieu HSH. Il y a une réelle communauté autour de la sexualité, qui peut fonctionner dans des milieux, par exemple de prostituées, il y a une communauté autour de la pratique professionnelle qui est lié au sexe. Les autres communautés, par exemple la communauté malienne et ivoirienne, n’ont pas tellement l’occasion de parler de sexualité ensemble et du coup, je ne suis pas sûre que l’information se relaye aussi bien en ce qui concerne très spécifiquement la PrEP.

On s’aperçoit dans les consultations PrEP que le suivi des preppeurs sature les consultations d’initiation, que pensez-vous de la délégation de tâches et pensez-vous que cela peut être mis en place dans le cadre d’un protocole de coopération ?

Dans l’expérience de l’hôpital de Montreuil, on a mis en place un protocole de coopération qui est en cours de validation institutionnelle et qui ne porte pas spécifiquement sur la PrEP. Il porte sur la délégation des tâches de dépistage notamment dépistage hors les murs. C’est l’amont de la PrEP, qui constitue le recrutement des personnes les plus vulnérables pour les mettre dans un parcours de santé sexuelle. Ce protocole décrit la délégation de la vaccination, du traitement des IST simples avec des procédures qui sont relativement bien faites. Pour la PrEP, ça commence à se faire mais ça ne marche pas très bien dans les hôpitaux. Je pense à Saint Louis, apparemment il y a eu une très grande file active de PrEP. Cela fait longtemps qu’il y a cette espèce de rengaine de déléguer à des professionnels paramédicaux le suivi. Ce n’est pas si simple parce que je pense qu’il y a quand même besoin d’une expertise médicale pour gérer de la consultation dans laquelle on prescrit des prophylaxies médicamenteuses dont on manage les effets secondaires. Ces consultations sont aussi des consultations de santé globale ; au moins une santé sexuelle globale. On est plutôt dans un positionnement où on s’appuie sur l’infirmière pour faire de l’éducation thérapeutique, le suivi de perdus de vue, les entretiens avec les patients les plus vulnérables mais aussi pour coordonner leur prise en charge avec l’assistante sociale, avec les associations, avec la sage-femme, avec la traumatologue qui prend en charge les personnes victimes de violences plutôt que d’être dans la prescription médicamenteuse.

Avec les deux ans de pratique en consultations PrEP, les premiers retours, qui sont fait, sont un nombre important de perdus de vue, comment vous expliquez cela et qu’est-ce que vous mettez en place ?                          

Je ne sais pas très bien ce qu’est un perdu de vue en PrEP. Dans le VIH, c’est assez simple. Quelqu’un qui est perdu de vue soit quelqu’un qui se fait suivre ailleurs soit quelqu’un qui a interrompu son suivi antirétroviral donc son traitement antirétroviral. En PrEP, les besoins des gens évoluent dans le temps donc je ne sais pas très bien à quoi ça correspond. Est-ce que ça correspond à quelqu’un qui aurait besoin de PrEP et qui n’en prend plus, ou bien, est ce que ça correspond à quelqu’un qui prend de la PrEP ailleurs, ou encore, est-ce que ça correspond à quelqu’un qui ne perçoit plus un risque d’exposition au VIH ou elle qui justifie de venir en consultation de faire des bilans de reprendre rendez-vous de s’engager dans ce processus au détriment d’autres impératifs de la vie quotidienne.

Cela peut correspondre à des réalités très différentes. Cela peut correspondre à quelqu’un qui est dans des impératifs de survie qui prennent totalement le dessus par rapport aux contraintes biomédicales. Cela peut être une femme en situation irrégulière, vulnérable, victime de violence qui n’a pas de titre de transport, qui a peur de se faire contrôler quand elle prend les transports transiliens, etc …. Cela peut correspondre à quelqu’un qui est venu une fois et puis finalement a une situation personnelle qui a évoluée et qui s’est mis en couple ou qui s’est séparé de la personne avec qui elle avait une relation avec laquelle elle n’arrivait pas à imposer le port du préservatif ou qui n’était pas dans une confiance suffisante pour se sentir affranchi du risque du VIH et qui du coup vient pas au rendez-vous suivant. Il y a des situations qui sont très différents. Il y a beaucoup plus de perdus de vue et il y a beaucoup de consultations non honorées parmi les personnes qui sont pas les publics HSH tout simplement parce que ce sont des publics qui ne sont pas demandeurs de PrEP. C’est une offre que nous apportons et qui ne correspond pas aux besoins ressentis par la personne et du coup c’est difficile encore une fois d’autres paramètres qui sont mis sur le haut du panier font passer la prévention complétement en deuxième plan. De toute façon, tant qu’on est pas une stabilisé résidentielle, stabilité administrative, d’un revenu minimal de subsistance, c’est très difficile de s’investir dans de la prévention.

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Interview Pauline Penot 81.15 KB - 11 avril 2018

Interview Pauline Penot - AFRAVIH 2018 ...

 

Interview Christine Kafando

Christine Kafando Présidente d’Espoir pour demain, celle qui coordonne aussi la Maison des associations est la première femme burkinabé à avoir témoigné de sa séropositivité à visage découvert.

Pour nos lecteurs qui ne vous connaîtraient pas, pouvez-vous présenter en quelques mots ?

Je suis Christine KAFANDO. Je suis venue du Burkina Faso et je suis la présidente d’une association de lutte contre le VIH sida qui regroupe plus de 90 % de femmes autour de 1250 personnes au sein de l’association et aussi les enfants vivant avec le VIH.

Pourquoi avez-vous décidé d’appeler votre association « Espoir pour demain » ?

 « Espoir pour demain » s’est créé parce qu’on  on avait pour objectif d’accompagner les enfants infectés. En effet, en son temps, il n’y avait pas de programme de lutte contre le VIH sida pour les enfants. Tout était pour les adultes, rien pour les enfants, alors que pour nous, les enfants c’est l’espoir. On s’est dit : « demain, ce sont les enfants qui vont nous remplacer et comme l’espoir est permis donc « Espoir pour demain ».

Quelles sont vos deux ou trois dates clés dans la lutte contre le sida ?

Les grandes avancées en 2002, lorsque dans mon pays le président de la république a annoncé la gratuité des antirétroviraux. Là ça m’a beaucoup aidé et  je me suis sentie bien parce que je me suis dit qu’on est proche de la victoire. C’était un grand jour,  pour nous qui avons connu les années sombres ;  c’est à dire les années où on nous dépistait et qu’il n’y avait pas de traitement. On prenait notre mal en patience et le jour où ils ont déclarés la gratuité des ARV et bien on a fait carrément une fête à l’association. L’autre date, c’est quand on m’a décoré la légion d’honneur française pour le travail que j’ai fait en 2014. J’ai compris que les gens me suivaient de prêt parce que je ne savais pas que l’on remarquait un peu ce que je faisais ; c’est là que j’ai compris que les actions que je mène sont suivies. En fait, je menais mon travail et je m’en fous de la politique. Je fais mon plaidoyer et j’avance avec les gens derrière suivaient mes pas et voyaient où je voulais en venir, donc  c’est une reconnaissance du travail mené. Puis le Burkina a reconnu aussi le travail et m’a donné l’ordre du mérite. Ce sont des dates qui m’ont marqué positivement. Il y a des dates qui m’ont marqué négativement aussi, quand on a perdu des grands amis du VIH,  des combattants de chemin,  des acteurs de la lutte qui sont tombés sur le poids du sida et là ce sont des périodes où c’était dur. Aujourd’hui,  nous,  on vit. On n’est pas plus intelligent, on n’est pas plus joli,  on n’est pas plus beau,  on n’est pas plus fort c’est nous qui vivons … c’est une injustice. C’est pour eux qu’on est toujours engagé parce que si on baisse les bras,  c’est comme si on les abandonnait.

Vous étiez une des premières femmes sinon la première à avoir déclaré sa séropositivité publiquement. Comment avez-vous affronté cette déclaration et est-ce que vous avez pu obtenir du soutien suite à cette annonce ?

En fait, c’est vrai que pour se déclarer positive en son temps,  dans les années 97-98, s’était pas du tout évident. J’étais surprise d’apprendre ma sérologie positive. Je me suis rendue compte que, dans mon entourage, il y a beaucoup de personne qui mourraient du VIH sida, particulièrement les femmes. Je suis allé voir le médecin infectiologue qui m’a proposé ce test. Je lui ai dit  que tôt ou tard je passerais par là et j’ai envie de passer ma vie à faire de l’aide, enfin aider les  gens pour qu’ils meurent dignement. En effet, les personnes infectées en phase terminale étaient stigmatisées, rejetées aussi bien par le personnel de santé d’abord que part la famille et abandonnées à l’hôpital. Il fallait quelqu’un qui accompagne ces malades parce que je me disais que tôt ou tard je passerais par ce même lit là aussi ; car il n’y avait pas de traitements. Je prenais mon mal en patience, en me disant que  ça peut être demain. Cela peut être n’importe quand donc il va falloir faire quelque chose pour ces gens-là et sensibiliser surtout les médecins pour qu’ils s’en occupent et que nous acteurs communautaires aussi. On peut faire quelque chose. En fait, j’étais la seule dans ce service-là à faire ça. On parle de la folie,  de la dépression. Les gens m’ont traité de folle. Même les médecins m’ont dit : «  tu vas vite mourir parce que tu vas chopper des infections ». Je m’en foutais parce que oui, pour moi c’était fini. Quand on meurt, on n’a plus mal donc du coup, c’est comme si j’avais envie d’attraper quelque chose dans ce service et puis en finir avec ça. Je voulais transformer ça en aidant et pouvoir partir aussi dignement. C’est ce qui m’a poussé à faire ça et puis à témoigner surtout à amener les  femmes à se faire dépister même s’il n’y a pas de traitement au moins de savoir de quoi on va mourir bientôt. C’est comme ça qu’un matin, je me suis levée et j’ai dit il faut que je parle de ce mot je suis allée parler de ce mot.

Qu’est-ce qui vous a particulièrement marqué dans votre parcours, vous parlez beaucoup des femmes et du parcours des femmes ? Est ce qu’il y a des hommes qui prennent conscience et s’engagent à vos côtés ?

C’est vraiment dommage parce que les hommes ne s’intéressent pas beaucoup aux associations. Les femmes vivant avec le VIH sont doublement discriminées. D’être femme d’abord elles sont marginalisées et pas assez considérées par notre communauté. C’est culturel et le fait d’avoir le VIH sida qui est une maladie stigmatisante. Elles sont accusées à tort et à travers d’avoir envoyé le virus dans le couple, dans la famille,  et le plus souvent,  elles vivent leur souffrance toutes seules. Quand  on approche les hommes pour essayer de les sensibiliser c’est lettre morte parce qu’ils ne vont pas poser d’actions. Ils ne vont pas changer leur comportement.  Ces  femmes n’ont pas d’autres solutions. Elles ne sont ni économiquement, ni socialement stables. Elles n’ont rien sur quoi s’appuyer pour dire que  même sans l’homme elles peuvent vivre donc elles sont obligées de subir,  d’accepter la souffrance que les hommes leurs font subir pour pouvoir rester dans leur foyer. En effet, chez nous,  une femme qui n’est pas mariée est mal vue ; elle n’est pas considérée donc elles sont là dans le foyer juste pour dire que je suis Madame tel. En fait,  il y a une forme d’hypocrisie dans tout ça mais bon c’est notre culture qui est comme ça et donc la souffrance des femmes quand on prend, par exemple la prévention transmission mère –enfant, on n’arrive pas à avancer car les hommes ne veulent pas venir dans les formations sanitaires pour se faire dépister et accompagner leur épouse. C’est la femme toute seule qui va venir se faire dépister. Si elle est positive, on va mettre en place un programme de prévention transmission mère-enfant. On cherche à joindre l’homme. Il ne vient pas. Lorsque la femme est enceinte,  il arrive juste que le monsieur donne son nom et sa profession  qu’on insère dans le cahier de naissance de suivi pré postnatal. Après ça,  c’est fini on peut plus mettre la main sur lui. Ceci montre que  les hommes ne sont pas assez impliqués. Ils n’accompagnent pas les femmes. Il faut dire que même s’ils sont infectés, ils font comme s’ils ne sont pas infectés et se cachent. Moi,  je me dis que les femmes sont toujours plus fortes que les hommes.

Votre présentation était sur vraiment la santé mentale et la dépression chez les femmes, avez-vous des professionnels pour vous accompagner, sont –ils présents ou est-ce que y a besoin d’aller les chercher, ou encore de lancer un appel pour justement cet aspect-là de la maladie soit aussi pris en compte ?

Les professionnels de santé, de toute façon, ne sont pas assez. Comme quelqu’un vous l’a dit,  on a un médecin pour environ 5 à 10 000 patients donc ce n’est pas possible,  c’est lourd donc on a besoin de personnels. On a besoin de faire le plaidoyer pour qu’il y en ait  plus de personnels compétents qualifiés. Je dirais qu’il faut renforcer la prise en charge de la santé mentale. C’est une épidémie oubliée, comme je l’ai dit tout à l’heure. Personne ne s’en est préoccupé même la communauté internationale, alors que c’est le début de la prise en charge. Dès qu’on te dépiste, déjà tu es sûr, tu es dans un état de choc parce que quand tu attends un résultat sans savoir à quel moment il sera rendu sans savoir quel résultat tu attends, que le résultat VIH arrive positif tu te dis : « ohlala ». Avant même de passer à la prise en charge, il faut un accompagnement psychologique. Dans nos pays, ce n’est pas le cas. On te dépiste, tu vas au traitement et puis voilà si tu arrives à monter un peu tes CD4, on voit si tu as besoin d’un psychologue ou pas mais c’est perçu comme un problème de folie donc même si tu as le souci, tu ne poses pas de problème. En fait, on va te stigmatiser et on va dire que tu es fou. Il y a beaucoup de chose à faire pour faire évoluer  la mentalité africaine tant au niveau des droits de la femme que de la reconnaissance des faiblesses. C’est un continent qui veut être fort,  un continent qui veut montrer la force et du coup ne veut pas accepter la faiblesse.

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Interview Christine Kafando 110.38 KB - 11 avril 2018

Interview Christine Kafando - AFRAVIH 2018 ...

 

AFRAVIH 2018 jeudi 5 avril : Portraits d’acteurs Jean-Marie Masumbuko et Emilie Seck

Interview d’ Emilie Seck

Emilie est-ce que tu peux présenter un peu ton parcours pour arriver jusqu’à Solidarité Sida et puis expliquer aussi qu’est-ce que Solidarité Sida ?

J’ai fait des études. J’ai un master en santé publique en action de sanitaire et sociale. Pendant mon master, j’ai travaillé sur la sexualité des jeunes, en faisant un premier stage au planning familial et un deuxième dans une association au Sénégal où j’ai travaillé sur la pénalisation du VIH. Ensuite, j’ai intégré solidarité sida en tant que service civique et finalement je suis restée. J’y suis toujours actuellement, en tant que chargée de prévention.

La première mission de Solidarité Sida est d’organiser des évènements pour récolter des fonds. On a fait le choix d’organiser des évènements donc de faire du don direct par exemple. On organise par exemple le festival Solidays, qui est l’évènement le plus connu. On organise aussi un gala. Notre idée c’est vraiment d’organiser un évènement pour récolter des fonds qui soient reversés ensuite en France et à l’international à des associations d’aide aux malades, de soutien aux personnes vulnérables ou à des projets de prévention. A côté de cela, on a aussi une mission de prévention en France. Le pôle prévention mène des actions en Ile de France et auprès des lycéens dans la France. On intervient autant auprès de la population générale type foyers jeunes travailleurs qu’auprès des populations clés notamment dans le quartier gay du marais et dans le milieu festif auprès des usagers de drogue ou encore en détention.

Quelles sont pour vous les dates clés importantes dans la lutte contre le sida ?

C’est l’arrivée des traitements en France donc en 1996. Une date importante puisqu’avant ça il n’y avait pas de traitement disponible. J’ai aussi en tête 1987, avec deux dates importantes cette année-là : l’autorisation de la publicité pour les préservatifs en France ; puisque jusqu’à là elle a été interdite, et le programme d’échanges de seringues.

Vous êtes sur le congrès AFRAVIH aussi pour la plateforme ELSA, pouvez-vous nous expliquer qu’elle est cette structure ?

C’est une plateforme collaborative entre des associations comme SOLTHIS, le planning familial, Solidarités Sida et Sidaction. Le but est de favoriser les échanges de bonnes pratiques, d’expériences autant sud-sud entre les différents acteurs associatifs qui sont représentés mais aussi nord-sud et nord-nord. Il y a, par exemple, un centre de ressources disponible sur internet avec des fiches pays, des fiches thématiques pour vraiment être en renforcement de capacité et capitalisation aussi sur les bons savoirs faire et qu’une fois que quelqu’un a une bonne idée on puisse aussi la transmettre aux autres, qu’elles puissent donner d’autres idées.

Vous parliez tout à l’heure du festival Solidays, pensez-vous qu’un festival comme Solidays soit initié dans un autre pays ou existe-t-il un autre festival avec le même but dans le monde ?

Je ne crois qu’il existe un autre festival avec ce but-là. Au festival Solidays, on fait venir chaque année des partenaires internationaux. Ils sont une vingtaine à venir chaque année et évidemment, à chaque fois, ça leur donne envie, ça leur donne des idées pour faire les mêmes initiatives dans leurs pays. Pour moi, c’est quelque chose qui est possible mais évidemment dans des contextes différents. Il y en a plein qui ont cette idée là, mais pour l’instant, cela ne s’est jamais fait. Un autre évènement qu’on peut organiser comme le gala, a déjà donné des idées pour faire des soirées charités à d’autres associations. Donc je pense que petit à petit cela peut se mettre en place et que peut-être qu’un jour, on aura un festival qui permet de lever des fonds pour la lutte contre le sida en Afrique.

Pouvez-vous nous parler des futurs projets de Solidarité Sida ?

Un futur projet qui s’appelle FORSS sur la zone Moyen-Orient / Afrique du Nord. C’est une zone où on a vraiment peu de données. L’idée est de faire un observatoire en Mauritanie. C’est un pays où le décaissement du fonds mondial est très faible, on est autour de 6 %. Il y a peu de données sur les populations clés et peu d’accès au dépistage. L’idée est qu’une association porte ce projet et qu’on puisse avoir des données pour faire du plaidoyer. C’est un projet important qui va commencer au mois de mai et qui sera porté par Solidarité Sida avec le soutien de l’initiative 5 %.  Côté prévention, nous avons aussi des projets de proposer à nouveau une exposition qui s’appelle « Sex in the city ». Une exposition de prévention avec un parcours dédié aux plaisirs, à la sexualité avant d’aborder les risques. On aimerait bien ressortir cette exposition à Paris mais aussi travailler sur un projet pour en faire une exposition itinérante, qu’elle puisse toucher d’autres villes en France.

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Interview Emilie Seck 86.73 KB - 6 avril 2018

Interview Emilie Seck AFRAVIH 2018 ...

 

Interview Jean-Marie Masumbuko

Pour les lecteurs qui ne vous connaissent pas encore, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je m’appelle Jean-Marie MASUMBUKO. Je suis ivoirien d’origine burundaise. Je vis en Côte d’Ivoire depuis 30 ans et je suis engagé dans la lutte contre le sida depuis 25 ans. Le créneau ONG qui s’appelle ruban rouge Côte d’Ivoire et après j’ai eu une deuxième vie de chirurgien pédiatre avant de revenir à mes premiers amours que sont le sida. Depuis une dizaine d’années, je suis à fond dans le VIH dans des programmes de développement d’accès aux soins et des populations clés en général. Voilà brièvement résumé ces 25 dernières années.

Dans quelle structure travaillez-vous et quelles sont ses missions ?

Je travaille pour PACSI qui est un site de l’ANRS en Côte d’Ivoire. C’est un centre de recherche. Nous faisons de la recherche clinique méthodologique, épidémiologique et opérationnelle depuis une vingtaine d’années. C’est vraiment une des structures de référence en matière de recherche en Côte d’Ivoire et même dans la sous-région. Une des grandes réussites de PACSI est la grande étude qu’on a appelée TEMPRANO qui a montré l’intérêt de faire des traitements précoces. Cela a permis de changer les directives de l’OMS qui ont abouti au Test and Treat. Cela a montré l’efficacité d’un traitement précoce pour le survie des personnes.

Quelles sont deux ou trois dates clés de la lutte contre le sida pour vous ?

Personnellement, je suis africain. C’est l’arrivée des traitements qui ont vraiment changé notre vie ; en fait la vie des malades, la vie des médecins et la vie des militants. Moi, j’ai commencé dans le sida en tant que militant. C’est vrai que je faisais des études de médecine. Je suis devenu médecin et quand je finissais ma médecine ; à savoir en 96 ; il n’y avait pas de médicaments accessibles pour les personnes qui en avaient besoin. Les premières molécules sont réellement arrivées en 97- 98. Nous, quand on découvre le VIH, on a 20/ 21 ans et à cette époque le sida était égal à mort car il n’y avait pas de traitement. L’arrivée du traitement a été, pour moi, un chamboulement complet mais surtout l’accessibilité à la plus grande population, avec l’accès gratuit en Côte d’Ivoire en 2007-2008. Cela fait 10 ans que l’accès est vraiment universel en tout cas en Côte d’Ivoire. Sinon, les autres dates, sont les avancées scientifiques lorsque les premières preuves d’efficacité du traitement ont montré qu’une personne infectée et sous traitement n’infecte plus son partenaire, cela a été un grand chamboulement. Maintenant, dans les nouvelles approches, comme la prévention ; à savoir la PrEP, je suis actuellement responsable d’un projet de la faisabilité de la PrEP chez les travailleurs du sexe en Côte d’Ivoire.

Vous présentez un projet autour des travailleurs du sexe, sur la conférence, pouvez-vous nous en dire plus ?

Comme vous le savez, la PrEP est devenue, entre guillemets, la grande mode. Depuis les deux grandes études Ipergay et Prod, qui ont montré leur efficacité chez les HSH en Europe et aux Etats-Unis. Très peu de données étaient réellement accessibles en Afrique de l’ouest surtout en Afrique du sud subsaharienne. En Afrique austral, ils sont un peu en avance sur certaines études mais réellement en Afrique de l’ouest pas grand-chose avait été mené donc depuis deux ans grâce à l’ANRS et un financement de la fondation Bill GATES, nous menons une étude de faisabilité de la PrEP chez les travailleurs du sexe. Avant de la débuter, il fallait faire une estimation de l’incidence. Comme vous savez, l’OMS préconise que la PrEP soit prodiguée dans les populations où l’incidence est élevée au-delà de 3 % et nous avons pu faire une étude de coïncidence chez les travailleurs du sexe dans deux grandes villes à Abidjan et à San-Pedro. Les résultats nous ont fortement surpris car il y a une différence d’incidence et de vulnérabilité des travailleurs du sexe entre Abidjan et San-Pédro. A Abidjan, on avait une incidence autour de 1,6 % chez les travailleurs du sexe contre 3,6 % à San-Pédro. Ceci démontrait que lorsque l’on parle de populations clés, il faut spécifier : toutes les prostituées ne sont pas vulnérables au même niveau. Il y en a qui ont accès à l’information, l’accès à la prévention et qui vont systématiquement se protéger donc peut-être pas besoin de la PrEP mais uniquement de l’accès aux préservatifs. D’autres qui n’ont même pas d’accès aux préservatifs et prennent des risques. Je pense donc, que la mise en place d’un programme de la PrEP doit vraiment tenir compte des spécificités régionales et pas seulement du lancement d’un vaste projet qui fonctionne ailleurs. C’est important que chaque pays, même chaque ville fasse une étude de sa réalité sociologique, et anthropologique épidémiologique avant de mettre en place ces nouveaux produits de prévention.

La PrEP nécessite un suivi biologique avec des rendez-vous réguliers, est-ce que par rapport à la vie des travailleurs du sexe, cela n’est pas trop contraignant et y’a-t-il une bonne observance dans la population ?

C’est vrai que cette interview est rapide pour pouvoir tout développer. Nous nous sommes rendu compte de l’importance d’un encadrement par les cliniques communautaires. La notion de communautaire est fondamentale. La PrEP ne pourra marcher, en tout cas dans notre expérience que nous avons montrée, que lorsque la population clé concernée, que ce soit les HSH comme les travailleurs du sexe ou bien les usagers de drogue, se retrouve dans un environnement où elle peut être suivie ou acceptée, elle ne sera pas discriminée ni stigmatisée. Pour l’instant, ces réalités n’existent que dans les structures communautaires qui sont déjà habituées à faire de la sensibilisation, de la prévention et de la prise en charge de ces populations clés notamment des travailleurs du sexe. Il est donc fondamental que nos politiques africaines encouragent ce genre de structures pour qu’elles existent dans tous les pays. Il faut que ce soit elles qui soient vraiment en première ligne pour porter le message de la PrEP et surtout le suivi aussi bien médical que social. En effet, à côté du volet médical, il faut que se soient elles qui répondent aux autres questions. L’enquête que nous avons mené en Côte d’Ivoire, auprès de 1000 femmes à Abidjan et 400 à San-Pédro, a montré qu’au-delà de la PrEP, les travailleurs du sexe avaient de véritables questions en santé sexuelle reproductive, sur la contraception et même sur la gestion des menstruations. Les questions que les gens n’ont pas toujours l’habitude d’aborder quand on est focalisé sur le VIH. Une des questions qui est souvent et qui est vraiment très parlante, à mon avis : en cas de rupture du préservatif avec un client, les travailleuses du sexe ne connaissent pas leur première angoisse au sujet du VIH mais plutôt la peur de la grossesse. Si on n’arrive pas à répondre à ce genre de question, on passe à côté. La PrEP ne pourra se concevoir que dans un environnement de santé sexuelle globale.

Quelle est la place et reconnaissance des acteurs communautaires dans la recherche ?

Elle est fondamentale sans les communautaires, sans les structures spécialisées, sans les cliniques, sans l’inventivité de ces cliniques communautaires où il y a le volet à la fois préventif mais surtout prise en charge, il n’y aura pas de réussite de la PrEP. Il est fondamental que les communautaires soient vraiment en première ligne de l’accès à la PrEP mais surtout de la mise en place et du suivi parce qu’il ne suffit pas juste de distribuer des comprimés. Il faut aussi suivre la personne, l’encadrer, savoir où elle en est, comment l’aider, répondre à ses autres questions et cela notre système classique public ne répond pas à toutes ces problématiques. Pour l’instant, c’est le communautaire qui arrive à le faire et c’est vraiment ce communautaire là qu’il faut mettre en première ligne parce que c’est vraiment eux qui sont au front.

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Interview Jean-Marie Masumbuko 108.91 KB - 6 avril 2018

Interview Jean-Marie Masumbuko - AFRAVIH 2018 ...

 

 

Portraits d’acteurs sur la conférence AFRAVIH 2018 mercredi 4 avril 2018 : François Dabis et Florence Huber.

Interview François Dabis

François Dabis : COREVIH Nouvelle Aquitaine mercredi 04 ouverture de la conférence

Le Pr Dabis est un expert du VIH reconnu au plan international pour ses nombreux travaux sur l’épidémiologie et les défis de santé publique posés par cette infection virale. Il s’est ainsi attaché, tout au long de son parcours d’enseignant-chercheur, à évaluer des stratégies tant dans la prévention de la transmission du VIH que dans la prise en charge des patients. Le Pr François Dabis est Directeur de l’ANRS ainsi que président du COREVIH et de l’IREPS Nouvelle Aquitaine.

Pour les lecteurs qui ne vous connaîtrait pas, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

François DABIS : je suis médecin épidémiologiste. Je suis professeur santé publique ; ici à l’université de Bordeaux. Je suis président du COREVIH Nouvelle Aquitaine et depuis un an également Directeur de l’agence nationale de recherche sida hépatite à l’ANRS.

Pour vous quelles sont les trois dates clés de la lutte contre le sida ?

Trois dates clés… uniquement trois. Certainement 1983, l’identification et la publication des virus. L’interaction entre association et recherche non pas parce que c’est une équipe française qui l’a fait mais sans l’identification de la cause, on n’aurait certainement pas progressé assez vite dans la première phase de l’épidémie. Même si les deux années qui ont précédées, on a pratiquement tout compris de l’épidémie et de la transmission de ce virus ; alors qu’on en avait pas la cause mais si on n’avait pas identifié la cause c’est sûr que ça aurait été absolument impossible. Certainement le deuxième moment, c’est l’émergence des traitements dans le monde ; c’est-à-dire le passage du traitement réservé aux pays industrialisés aux traitements dans le monde entier. Soit en 2002, la conférence de Barcelone. En effet, c’était un peu la fin d’un cycle : Jacques CHIRAC, en 1999 va annoncer que les traitements étaient aux nord et les malades au sud ; puis, en 2000, Nelson MANDELA a dit à Durban que c’était inacceptable. En 2002, Nelson MANDELA monte à la tribune avec Bill CLINTON (qui n’était plus président à l’époque) pour dire qu’il fallait passer à l’acte. Ceci a permis, à partir de là, la bascule dans l’air des traitements dans le monde entier. Peut-être que la troisième date que je retiendrais, c’est probablement 2012-2013 ; à savoir la démonstration absolue que le traitement c’est la prévention. Pour le dire autrement, l’essai HPTN 052 qui démontrent définitivement qu’on peut réduire 96 % de la transmission par le traitement. C’est 3 dates prises parmi d’autres…

Par rapport à ces dates, quel impact ça a eu sur l’implication des associations des comités au sein de la lutte ?

Je ne pense pas que la première date cité, 1983, ai eu beaucoup d’impact sur le mouvement associatif ni sur la lutte communautaire. De toute façon, les associations étaient déjà à l’époque en train de s’organiser et elles avaient tellement de choses à gérer qu’il y a eu peu d’interactions avec la science (même si on a vu si vous regardez 120 battements par minutes   que très rapidement la science et le milieu communautaire se sont pratiquement reliés). Il est clair que 2000-2003, avec l’émergence des traitements dans le monde, ça a été décisif. Il faut se rappeler Treatment action campagn en Afrique du Sud et un militant faisant la grève des traitements en disant : « si moi j’ai la chance d’être traité et qu’on ne peut pas traiter les autres et bien je préfère arrêter de prendre les traitements et mourir comme les autres ». C’était, quand même, des moments incroyablement forts. Je trouve que la lutte rassemble à la fois la science et le milieu associatif pour un plaidoyer. Sur la dernière période, concernant le traitement comme moyen de prévention, les associations ont rejoint le mouvement et ont participés à la mobilisation pour le traitement universel. Mais s’il n’y avait pas eu les avancées scientifiques aussi importantes, je pense que le plaidoyer n’aurait pas fonctionné. Ici, c’est un peu l’inverse les associations ont rejoints un mouvement que la science avait vraiment ouvert.

Ceci nous amène à la place des associations dans la recherche car avec l’enquête Parcours et Ipergay notamment on a vu leur capacité à pouvoir intégrer la recherche.

On voit bien que l’interaction entre association et recherche s’est passée en trois phases.

La première phase, c’est celle qui est parfaitement décrite dans 120 battements par minute c’est-à-dire où les associations avaient à défendre le droit des malades et la nécessité absolue de les associer aux étapes de la recherche. C’était un droit qu’il fallait obtenir. Deuxième étape qui a duré longtemps, a été la co-construction de beaucoup de projets de recherche avec le milieu associatif et pour exemple le Trt 5 qui a été un outil quasi parfait. La troisième phase, beaucoup plus récente, a été, à mon avis, le démarrage en France d’Ipergay. Je ne suis pas sûr que beaucoup d’autres pays puissent dire qu’ils l’ont fait. Ce n’est plus la co-construction mais l’animation et la responsabilité directe des associations pour piloter de la recherche et ça c’est une nouvelle forme de leadership. A l’ANRS, on le stimule, ce n’est pas évident. A part Parcours, on n’en a pas 250 exemples. Cependant, on sait qu’aujourd’hui en France, nous avons la capacité d’avoir des associations qui peuvent être des leaders aussi bien dans la lutte que dans la recherche.

Pour finir, dans le Sud, à propos des recherches, est-ce qu’il y a des recherches notamment sur la PrEP qui engageraient justement des communautés ?

Le démarrage s’est fait presqu’en parallèle ; c’est-à-dire que s’il n’y avait pas eu les associations au sud, les programmes de recherches n’auraient pas pu s’exécuter aussi vite. Les associations ont répondu présents et grâce à cette synergie, nous avons pu faire pression sur les autorités pour mener des recherches et pour que des comités d’éthiques se développent aussi. Ceci afin de se consolider et travailler dans de bonnes conditions. J’estime que les associations du sud ont fait le même job d’une manière différente, un militantisme différent. Ils n’ont peut-être pas atteint le stade de responsabilité d’être les premiers responsables de la recherche mais j’ai bonne espoir sur des sujets comme la PrEP. Quelques excellentes associations, dans les pays francophones sont en capacité de le faire.

Allons-nous avoir de la coopération internationale au sein des COREVIH ? Est-ce que les COREVIH doivent faire de la coopération internationale ?

Aujourd’hui, il n’y a plus Esther ni tous ses mécanismes. Cela ne fait pas partie des textes réglementaires des COREVIH, ni de l’instruction que le Ministère va donner aux ARS. Cela pourrait être un vrai sujet de débat entre administrateur et coordonnateur de COREVIH. Il faudrait trouver d’autres formes de collaborations. Je ne pourrais pas répondre aujourd’hui s’il faut que les COREVIH s’engage sur l’international.

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Interview du Pr François Dabis 367.11 KB - 6 avril 2018

Interview du Pr François Dabis ...

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Pronostic et suivi des pvVIH libérées du centre pénitentiaire de Guyane 641.25 KB - 6 avril 2018

Pronostic et suivi des pvVIH libérées du centre  pénitentiaire de Guyane : premiers...

 

Interview Florence Huber

Madame Florence HUBER est médecin spécialisé en Dermatologie et Vénérologie. Elle consulte au Centre Hospitalier Andrée Rosemon à Cayenne en Guyane.

Pouvez-vous vous présenter en quelques mots

Je suis Florence HUBER

Pouvez-vous nous décrire la ou les structures où vous intervenez ?

J’ai plusieurs casquettes, une hospitalière, je suis médecin à l’hôpital de jour adultes de Cayenne, je suis également en charge des personnes infectées par le VIH au centre pénitenciers,  j’ai des activités associatives, je suis présidente du réseau ville hôpital qui s’appelle le réseau kikiwi et enfin plus récemment depuis fin 2013, je coordonne les CeGIDD pour la Croix Rouge comprenant également un centre de vaccination et lutte antituberculeuse pour les centres de prévention santé de la Croix Rouge de la Guyane donc sur tout le littoral guyanais c’est-à-dire Cayenne, Saint Laurent.

 

Quels sont pour vous 2 ou 3 dates clès de la lutte contre le Sida ?

La première date est 1981, c’est là où tout a commencé, la découverte du virus le début d’une grosse galère et aussi d’une belle histoire. Fin 1995, début 1996 avec les trithérapies là ça a été la révolution, des patients qui ressuscitaient des morts c’était quand même assez fabuleux et puissant. Troisième période je dirais que c’est aujourd’hui, on est à un tournant où finalement si on prend l’hypothèse pessimiste on risque de stagner et de plonger, de se contenter d’une certaine médiocrité, finalement les personnes les plus vulnérables, les minorités, vont rester lourdement affectées et les autres vont s’en sortir et l’autre hypothèse plus optimiste, c’est qu’on arrive à garder cette motivation, cette mobilisation qui est phénoménal en terme de santé internationale, c’est quand même un cas d’école ce qui s’est passé dans le VIH.

Concernant votre présentation quels sont les moyens que vous avez pu mettre en place en Guyane pour garder dans le soin les sortants de prison tout en étant confrontés aux sorties sèches ?

C’est une question difficile on ne peut pas dire qu’on est optimum, on essaye de s’améliorer c’est une problématique compliquée le premier enjeu c’est la préparation de la sortie comme je l’ai montré dans mon exposé. J’ai essayé de le démontrer avec un vrai travail de collaboration pluridisciplinaire sur l’organisation des sorties. Pour ça il faut pister les dates de sorties, ce qui n’est pas une mince affaire notamment quand on a des prévenus qui sont libérés à l’issue d’un procès, ça on ne maîtrise pas forcément les choses. Il faut pister les dates de sorties travailler main dans la main avec le SPIP ce n’est pas évident dans tous les centres pénitenciers mais en Guyane je dois dire qu’on y arrive quand même un peu. A chaque vacation je passe un coup de fil au SPIP. Il faut essayer de créer, de concevoir des projets avec des patients, avec le SPIP, avec les travailleurs sociaux (même s’ils ne sont pas très nombreux) et enfin après ce travail d’organisation de ces sorties la problématique de l’hébergement crucial puisqu’on a environ un tiers des sortants qui sont sans abri ou en habitat informel, un squat ; ça c’est un gros défi et pour avoir un hébergement il faut un accès au droit, ou en tout cas une perspective d’un accès aux droits, ce qui est le plus gros défi d’entre tous donc on travaille avec des partenaires tels que le CDAD la Commission Départementale d’Accès aux Droits, le SPIP bien sûr, mais ils ont très peu de temps à nous accorder sur ces points là on n’a pas de travailleurs sociaux dédiés donc gros soucis. En fait, pour faire clair, on est très souvent dans l’impasse. J’ai le sentiment très souvent de mentir à mes patients. La problématique post carcérale, la problématique VIH en milieu carcérale est une problématique de réinsertion essentiellement ou même d’insertion car pour certains ils n’ont jamais été insérés donc on peut parler d’insertion. Quand on voit que dans des pays d’Amérique du Nord on a deux fois plus de conseillers d’insertion pour le même nombre de détenus on a compris qu’on mène un combat qui pour certains sont perdus d’avance et ce qui est très désagréable c’est d’avoir le sentiment de mentir au patient en leur disant « voilà on va demander une carte de séjour pour soins ou on va essayer d’avoir un hébergement » alors que dans les faits c’est bien souvent impossible et ça c’est très douloureux, très usant. Les patients sont plutôt de bonnes compositions mais en tout cas moi ça me pose un réel problème de cas de conscience. J’ai l’impression en tout cas en Guyane que je suis arrivée à peu près au bout de ce que je pouvais faire en termes de biomédicale et qu’après le reste joue plus sur des combats politiques sur les plaidoyers, de lobbyings en sachant que la conjoncture actuelle est pas très favorable. En Guyane on a eu des mouvements sociaux assez intenses avec des bons élans xénophobes qui ont refaits surface avec des propos sécuritaires qui étaient quand même très dure envers les détenus donc on n’a pas de bons retours quand on propose de donner plus de droits et de favoriser l’insertion des détenus, ce ne sont pas des sujets d’actualité en Guyane actuellement. Je pense que sur l’ensemble du territoire français également ce ne sont pas des sujets très porteurs malheureusement.

Quels sont vos outils de dépistage rapides VIH ou autre en prison ?

On n’utilise pas beaucoup de TROD enfin quasiment pas puisqu’on a des outils sérologiques, on combine le dépistage syphilis, hépatite B, hépatite C, VIH avec finalement des rendus de résultats en une semaine environ. Après dans notre étude CAP VIH faite en 2014 on avait une proposition conséquente de patients disant ne pas avoir reçus de résultats sérologiques. Grâce aux résultats de notre étude on a pu réussir à corriger le tir, on s’est quand même amélioré, les médecins de l’UCSA qui sont des médecins généralistes très engagés reconvoquent systématiquement les personnes qui ont été testées pour remettre les résultats. À priori là on est plutôt pas mal car c’est exceptionnel que les détenus refusent. Pour toutes ces raisons on a pas forcément eu l’utilité d’utiliser des TROD, même si la question reste posée, mais en tout cas dans l’ordre de priorité ce n’est pas paru en numéro un.

Est-ce que les 21 cohortes du projet MARIC arrivent aux mêmes conclusions ?

Le projet MARIC est un projet international de grande ampleur, on inclut plus d’un million de sortants de prison sur pas mal de pays, piloté depuis l’Australie. Il faut savoir que le projet MARIC s’intéresse aux sortants de prisons tout venants pas forcément infectés par le VIH donc je pense que ça les intéresse d’avoir une cohorte de patients infectés par le VIH parce que ça permet d’avoir des analyses beaucoup plus spécifiques. Sur plus d’un million de sortants nous nos 147 patients n’ont pas forcément un poids très conséquent dans les analyses néanmoins ça me flatte beaucoup qu’ils nous aient proposé de participer au projet. Il y a une problématique de surmortalité carcérale qui dépasse la question du VIH. On a une forte mortalité dans les jours ; voire les mois qui suivent une incarcération indépendamment du VIH. Quand en plus on est infecté par le VIH on cumule la vulnérabilité socio-économique des anciens détenus plus la vulnérabilité biomédicale des personnes infectées par le VIH. Donc on cumule les deux types de vulnérabilités et ça fait un cocktail explosif en termes de mortalité.

En revanche, je ne peux pas vous répondre, sur les résultats qui sont différents d’un pays à un autre dans ce projet MARIC car il y a très peu d’étude déjà publiée. Les anciens détenus meurent beaucoup de morts violentes, d’accident de la route. Ils ont des pratiques à risque dans tous les domaines ; sans parler des overdoses pour les toxicomanes ni des homicides. Donc on a beaucoup de raison de mourir quand on sort de prison en plus du VIH.

En savoir plus….

Santé en milieu carcéral

AFRAVIH 2018 | Amphithéâtre B
mercredi 04 avril 2018 | 13:50 – 14:10
Type: Symposiums et espaces agora
Présentation :

14:00 – 14:10 Pronostic et suivi post-carcéral des PVVIH
Orateur(s): Florence HUBER (Guyane Française)

 

Présentation le 11 septembre 2015 plénière COREVIH de la thèse d’Alice Merceron : pronostic et suivi médical des patients détenus infectés par le VIH sortis de prison

La Guyane est le département français où la prévalence du VIH est la plus élevée. Comme décrit ailleurs, l’incarcération y a souvent un impact positif sur le diagnostic et sur les paramètres biologiques des personnes vivant avec le VIH (pvVIH). Dans l’unique centre pénitentiaire de Guyane 29,9% des détenus étaient sous traitement ARV à l’entrée en détention, contre 50,3% à la sortie. A l’inverse, 55,8% (n=147) des anciens détenus infectés par le VIH étaient en rupture de suivi un an après leur libération (Merceron, 2015, Huber 2017). Cette communication porte sur les premiers résultats de la recherche opérationnelle Kaïros.

Méthode: Le projet est mené par une équipe interdisciplinaire et interdépendante (sociologue, SPIP, médecin). Objectifs du projet Kairos ▪ Identifier les facteurs favorisant/entravant le suivi post-carcéral des pvVIH. ▪ Faciliter l’orientation post-carcérale des détenus. ▪ Participer à l’insertion socio-sanitaire des détenus, en traitant des enjeux de la RDR ▪ Faciliter le travail en réseau et les collaborations interdisciplinaires autour des malades chroniques après un épisode carcéral. Nous avons interrogé un public diversifié : détenus/ex-détenus vivant avec le VIH, détenus prochainement libérés, professionnels impliqués dans l’insertion socio-sanitaire des détenus. Les analyses préliminaires montrent d’ores et déjà trois résultats importants ➢ Les structures ressources sont méconnues d’un public à risque et en augmentation. Les détenus cumulent des vulnérabilités socio-économiques particulièrement péjoratives (absence d’activité salariée, pas de domicile fixe, séjour irrégulier, addiction aux drogues, etc.), et ils méconnaissent, voire ignorent les actions menées par les structures « ressources » présentes en détention et hors les murs. ➢ Le genre pourrait déterminer l’observance thérapeutique. L’analyse des premiers entretiens suggère que les hommes avaient peu de connaissances sur le VIH avant leur diagnostic, et étaient plus enclins à interrompre le TARV à la sortie d’incarcération. Cela corrobore les résultats d’une étude CAP réalisée en 2015, où les scores de connaissance des femmes étaient significativement supérieurs aux hommes, parmi les détenus de Guyane. En outre, les femmes rencontrées déclaraient effectuer des dépistages réguliers, contrairement aux hommes. ➢ A l’encontre des idées reçues… Pour la plupart des intervenants du champs sanitaire et social interrogés, la situation administrative, économique, et l’absence de domiciliation seraient les trois facteurs principaux qui entraveraient le suivi post-carcéral. Or, les premiers résultats de l’analyse des regards croisés de Kaïros suggèrent que la stabilité du réseau familial et amoureux pourrait être un facteur déterminant pour le suivi post-carcéral. Conclusion et perspectives Alors que le contrôle de la charge virale est une condition essentielle pour stopper la transmission du VIH, les ruptures de suivi post carcérales posent des problèmes sanitaires sur le territoire guyanais, où on estime qu’environ 5% des pvVIH sont sortis d’incarcération entre 2007 et 2013. Malgré les actions menées par les acteurs associatifs, les pvVIH ayant connu un épisode carcéral semblent éloignées des structures d’accompagnement. Le ciblage et les stratégies d’intervention devraient sans doute être réexaminés. Les liens affectifs préexistants pourraient être des déterminants essentiels pour maintenir le suivi au delà de la détention. Ces résultats préliminaires méritent néanmoins d’être conforté par les analyses ultérieures. Un contrat d’initiation de l’ANRS a permis d’amorcer le projet Kaïros en 2015. Ce projet a ensuite obtenu des financements de la MILDECA national et de l’ARS de Guyane.

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Interview Florence Huber 186.99 KB - 6 avril 2018

AFRAVIH 2018 ...

 

 

 

Bonjour à tous,

Les conférences internationales, telles que l’AFRAVIH 2016 (Alliance Francophone des Acteurs de Santé contre le VIH et les infections Virales chroniques) ont été l’occasion de nombreuses rencontres et d’échanges avec des personnes œuvrant dans la lutte contre le Sida.

Les COREVIH Bretagne et Ile De France Sud, ont voulu, au travers d’une série d’interviews répertoriés dans le livret ci-joint, vous apporter les points de vue de différents acteurs de la lutte.

Aussi, vous y retrouverez des témoignages d’acteurs du monde associatif, médical, de l’industrie pharmaceutique qui démontrent la nécessité de travailler ensemble, telle la philosophie de nos COREVIH. Pour l’AFRAVIH 2018 qui se déroule du 4 au 7 avril à Bordeaux, nos échanges vous seront partagés au quotidien.

Alors à demain et en attendant, nous vous souhaitons une bonne lecture….

Philippe Sagot et Hadija Chanvril
Coordinateurs COREVIH

 

PORTRAITS D’ACTEURS AFRAVIH / Interviews d’acteurs de la lutte contre le VIH, les hépatites et les IST…

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AFRAVIH 2016 2.93 MB - 4 avril 2018

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